Qualifier les crimes nucléaires français à Reggane "d’explosions" et non pas "d’essais"

ADRAR – Des associations de la wilaya d’Adrar appellent à qualifier les crimes nucléaires perpétrés par la France coloniale à Reggane (Sud d’Adrar) « d’explosions »  et non pas « d’essais ».

S’exprimant à l’APS à l’occasion de la commémoration du 58ème anniversaire de ces explosions, des représentants de ces associations rejettent avec vigueur la qualification, par certains, de ces crimes de simples « essais nucléaires » de Reggane au lieu d' »explosions », au regard à leurs séquelles dévastatrices affectant aussi bien l’Homme que la Nature.

Le président de l’association « 13 février 1960 » de la wilaya  d’Adrar, Sid Ameur El-Hamel, a estimé que l’appellation « essais nucléaires » renvoie à « un signifié tacitement pacifique » pour un des plus atroces crimes nucléaires commis contre l’humanité et consistant en les explosions dénommées « Gerboise bleue française », ayant secoué un 13 février 1960 la paisible contrée de Reggane et ses environs.

« Il faut appeler les choses par leur nom », par fidélité à la terminologie sémantique, notamment à la lumière du contexte juridique dans la définition des véritables et réels concepts des explosions nucléaires coloniales gravées dans l’histoire humaine, passée, présente et future, a souligné M.Hamel.


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Selon l’intervenant, « les Essais nucléaires » est une appellation euphémistique utilisée intentionnellement par la France coloniale pour occulter l’ampleur et l’horreur de cet abominable crime ayant détruit des vies humaines et fait de nombreuses victimes, dont certaines encore vivantes, présentent des séquelles de cet acte criminel.

« Les manœuvres et conditions utopiques avancées par la France quant à l’indemnisation des victimes des crimes nucléaires de la région corroborent les intentions loin d’être innocentes de l’usage de ce terme à connotation évasive de la responsabilité’’, a expliqué le président de l’association.

L’appellation « trompeuse » entrave les efforts des hommes de droits et des acteurs civils à condamner et rejeter ce crime nucléaire, a-t-il ajouté.

Défendant la thèse de crime et d’explosions nucléaires pour démonter ce qui a été avancé par leurs auteurs, Sid El-Hamel a relevé  que « s’il s’agissait seulement des essais nucléaires, ils les auraient menés dans les laboratoires de leurs pays au lieu de se déplacer à des milliers de kilomètres, dans le Sahara d’Algérie, et effectuer leurs forfaits destructeurs dans un espace ouvert, précisément au site de Hamoudia, à Reggane, où ils ont hypothéqué la santé humaine et l’environnement pour des milliers d’années ».

« Il est inconcevable et déplorable d’entendre utiliser le mot ‘essais’ nucléaires sur des tribunes et scènes nationales au lieu d’explosions », a soutenu l’intervenant, en notant que « les Algériens ne sont pas obligés d’adopter cette appellation qui ne sert pas notre cause, mais la brouillera, au contraire ».

Il a, pour cela, appelé le milieu journalistique national à consacrer le terme d’explosions nucléaires qui, a-t-il dit, présente une qualification précise et réelle exprimant fidèlement les « crimes nucléaires coloniaux dans le Sahara d’Algérie ».

Le responsable de l’association a plaidé pour la mobilisation des moyens et équipements technologiques à même d’analyser et de détecter la radioactivité dans la région, en vue de prendre éventuellement les mesures préventives nécessaires et assurer la sécurité sanitaire de la population locale.

 

Rattraper les dangers encourus par la mise en place de mécanismes efficients de prise en charge de la population

 

Le président de l’association de solidarité « El-Gheïth El-Kadem » de Reggane, Toumi Abderrahmane, a, de son coté, appelé à agir rapidement pour rattraper les dangers et séquelles palpables encourus des explosions nucléaires et ce, par la mise en place de mécanismes opérationnels et efficaces en vue d’améliorer la prise en charge sanitaire de la population et mettre un terme à la radioactivité.

Pour ce faire, l’intervenant a préconisé la mobilisation de moyens et d’équipements de détection et d’analyses médicales des plus performants, d’œuvrer au nettoyage des déchets irradiés menaçant l’environnement à la faveur de la disponibilité de moyens technologiques utilisées dans le domine.

Tirant la sonnette d’alarme, le même responsable de l’association a estimé que « ces explosions nucléaires ont engendré, par leurs effets ionisants, de dangereuses séquelles sur la vie  humaine, l’environnement, la faune et la flore ».

« Ils ont été à l’origine de l’apparition de nouvelles pathologies, méconnues jusque là dans la région, à l’instar des fausses couches, des malformations néonatales, des cancers, de la leucémie et de la cécité, dues à l’exposition à la radioactivité », a-t-il relevé.

Pour M.Toumi, « de nombreux citoyens de la région affichent leur appréhension à voir leurs enfants irradiés et d’endurer la souffrance, au regard de la radioactivité encore présente dans la région, parfois provoquée par l’exploitation par certains, par ignorance des séquelles d’irradiation, d’outils et matériels métalliques acquis du site de ces explosions nucléaires, dans la construction de leurs bâtisses.

L’épidémiologiste Dr M’hamed Mabrouki a, pour sa part, établi le lien entre ces explosions nucléaires et l’émergence dans la région de maladies cancéreuses et ophtalmiques, ainsi que de fausses couches et de malformations, en plus de séquelles sur la faune, la flore et la nappe hydrique souterraine.


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Il a, pour étayer cette thèse, fait état de liens entre la radioactivité et certaines maladies cancéreuses, dont la thyroïde, ajoutant qu’il existe tant d’indices démontrant ces effets radioactifs, suite notamment au recensement de cas de cancer du colon, classé l’année dernière en tête des cas de cancer au niveau de la wilaya d’Adrar, suivi des cancers du sein et des poumons.

De l’avis de ce spécialiste, il s’avère « urgent et nécessaire » d’arrêter un plan d’action à même de permettre le dépistage précoce des maladies cancéreuses chez la tranche d’âge des 45 ans et plus chez les hommes et des 35 ans et plus chez les femmes, en plus de la programmation du traitement en temps approprié pour prendre en charge les malades.

Dr Mabrouki a préconisé également l’acquisition de certains moyens nécessaires pour un meilleur dépistage et diagnostic du cancer, dont la réalisation d’un laboratoire d’anatomie, l’établissement d’un registre des malformations néonatales, d’un autre de dépistage chromosomique pour être mis à contribution comme données fiables afin d’établir le lien des maladies à la radioactivité.

Il a estimé que registre actuel des cancéreux existant à Adrar n’est qu’un carnet descriptif sans étude analytique.

Le même responsable a émis le souhait de voir le centre anticancéreux d’Adrar contribuer à garantir les actions précités, dont le dépistage précoce du cancer, en vue d’une meilleure prise en charge médicale des patients et leur suivi périodique et régulier, en leur épargnant les lourdes charges et pénibles déplacements vers d’autres régions pour des motifs de soins.


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