Le Premier ministre M. Abdelmalek Sellal a prononcé samedi à Alger une allocution à l’ouverture de la rencontre Gouvernement-Walis dont voici le texte intégral :
Mesdames et messieurs,
Il me plaît au début de cette intervention de souhaiter la bienvenue à chacune et chacun d’entre vous et de vous transmettre les salutations de son excellence monsieur le Président de la République notamment à madame et messieurs les walis qui ont été nommés dans leurs nouvelles fonctions ou redéployés vers d’autres wilayas. Le chef de l’Etat vous assure de son soutien et vous encourage à redoubler d’efforts pour l’atteinte des objectifs que nous nous sommes fixés : « développer notre pays dans la paix et la fraternité et bâtir ensemble un avenir meilleur pour tous ses enfants ».
Notre rencontre se tient à quelques jours de la rentrée sociale de la seconde année du quinquennat 2014/2019. Les derniers mois qui se sont écoulés ont été marqués au niveau mondial par des tensions économiques, politiques et sécuritaires.
Le citoyen algérien, les médias, la classe politique et la société civile sont en droit de s’interroger sur les impacts de ces crises sur notre pays et son développement futur. Face à ces questionnements légitimes, le Gouvernement a constamment fait le choix de la vérité et de la transparence car nous sommes convaincus que c’est l’unique voie pour gagner la confiance et l’adhésion de tous à l’œuvre de renouveau national mais aussi pour mettre à nu les amalgames, les surenchères et les tentatives de manipulation.
Ce conclave participe à cette démarche de transparence et de pédagogie. Il sera suivie par une rencontre avec des académiciens et des universitaires organisée par le CNES ainsi qu’une troisième avec le patronat et les partenaires sociaux dans le cadre de la tripartite.
La communication institutionnelle ne doit plus être ponctuelle ou conjoncturelle, c’est un effort continu pour expliquer notre démarche mais aussi pour écouter et échanger avec les différentes forces vives de la nation.
« L’avenir ne peut être subi si les volontés s’expriment, si les choses sont dites avec franchise »
La baisse des cours pétroliers sur les marchés internationaux a été brutale et soudaine. Nombre d’analyses convergent vers l’étalement de cet épisode baissier sur une période plus au moins longue avant des remontées prévisionnelles.
L’économie mondiale traverse une zone de turbulence qui risque de s’étaler dans le temps. L’équation qui se pose à nous est simple : faire traverser au « navire Algérie » cette tempête, en continuant à moderniser notre pays et à le doter d’infrastructures socio-économiques tout en préservant les acquis sociaux et en puisant le moins possible dans notre trésor de famille constitué de nos réserves.
L’étalement de la baisse des cours pétroliers aura pour conséquences la contraction des ressources du Fonds de régulation des recettes et l’accroissement de la dette publique interne. La situation est plus tendue pour les finances publiques que pour la balance des paiements. Cela plaide pour des actions en matière de rationalisation des dépenses publiques et le développement du marché des capitaux.
Nos marges de manœuvre budgétaires et financières nous permettent d’aborder avec sérénité la situation, mais elles ne doivent pas être avancées pour justifier le statu quo. Il ne faut ni s’alarmer, ni s’endormir, mais bouger dans la bonne direction avec ambition et courage.
La conjoncture actuelle est certes difficile mais elle offre aussi une excellente opportunité d’introspection et de prise de décisions audacieuses pour construire une nouvelle vision économique et modifier nos modes de fonctionnement et de régulation.
Au lieu et place de l’austérité, nous optons en Algérie pour la croissance et la relance économique. Des actions de rationalisation sont et seront menées pour mieux maitriser les dépenses de l’Etat et elles seront étendues aux collectivités locales dont nous attendons la même discipline dans l’allocation et l’utilisation des deniers publics.
Des mesures de réajustement ont été décidées pour rationaliser la dépense publique et mieux maîtriser le commerce extérieur et les flux de capitaux. Cependant le Chef de l’Etat a été clair dans ses directives au Gouvernement afin de préserver le pouvoir d’achat des Algériens et poursuivre l’effort en matière d’action sociale et des programmes dans les domaines de l’emploi, du logement, de la santé, de l’éducation.
Pour réduire le flux des importations, une définition plus précise a été fixée pour les filières préférentielles à haute valeur ajoutée et en capacité à contribuer à la modernisation du pays et au transfert de technologies. Une action est également menée sur la structure et les modes d’attribution des contingents d’importation.
Les dispositions de la loi de finances complémentaire pour 2015 et celles de la loi de finances pour 2016, actuellement en cours d’élaboration, vont dans cette direction à savoir l’optimisation des recettes du budget de l’Etat, le soutien aux entreprises, la facilitation de l’investissement ainsi que l’encouragement du secteur national productif, et rester dans une perspective de croissance.
En 2016, le gouvernement présentera un budget qui table sur une croissance de 4,6% (en hausse d’un point par rapport à 2015) et dont les dépenses globale seront en baisse de près de 9%, sans pour autant entraver la réalisation du programme de logement (approbation des marchés de 22.000 unités rien que mercredi passé) ou les recrutements dans les secteurs de formation et de santé qui enregistreront l’ouverture de près de 10.000 nouveaux postes budgétaires.
« Il faut mieux compter nos sous mais sans faire caler le moteur économique qui soutient l’emploi et le pouvoir d’achat »
L’acte de commerce est actuellement plus attractif que l’investissement et la production. Nous devons inverser cette situation et pour cela nos chantiers prioritaires sont l’amélioration du climat des affaires et la facilitation des procédures économiques et des créations d’entreprises.
La promotion de l’investissement national, qu’il soit public ou privé, est une priorité nationale et c’est ensemble que nous devons trouver les solutions aux contraintes et aux entraves qui empêchent son développement.
La complexité des procédures, les confusions de prérogatives et de missions, les réflexes de passivité sont autant de verrous qu’il nous faire sauter pour libérer les potentialités nationales et la créativité de nos opérateurs économiques. Il faut mettre fin aux comportements bureaucratiques qui paralysent les initiatives et portent préjudice à notre crédibilité et à notre économie.
Le rôle des autorités locales et à leur tête les walis, et bien sûr les P/APC, est déterminant dans cette démarche. Vous êtes madame et messieurs la clé de voute de notre dispositif et c’est un véritable surpassement de soi que nous attendons de vous.
Bien qu’importants, les taux d’avancement des projets et la consommation de crédits ne doivent plus constituer les seuls indicateurs de performance de la gestion locale. Aujourd’hui vous serez évalués sur les créations d’activités et d’emplois, l’implantation d’investissements et d’entreprises et l’évolution de l’attractivité économique des territoires dont vous avez la responsabilité.
La relation de l’administration locale avec l’entrepreneur ne doit plus se limiter à une prestation administrative de délivrance d’autorisations ou d’agréments. Il s’agit de mettre en place des dispositifs d’accompagnement continu en amont et en aval où le wali serait un véritable VRP (Vendeur, Représentant et Placier ou représentant commercial –NDLR) de sa wilaya en allant démarcher les potentiels investisseurs et en faisant la promotion des atouts de ses communes et daïras.
Désormais, c’est aux walis qu’échoit, à travers une procédure simplifiée, la prérogative d’octroi du foncier industriel qu’il relève du domaine privé de l’Etat, d’actifs résiduels d’EPE ou des terrains des zones industrielles ou d’activités. Je compte sur vous pour prendre les dispositions nécessaires pour garantir un traitement diligent des demandes de cette nature et pour veiller personnellement à la réception rapide de la cinquantaine de parcs industriels en cours de réalisation.
Les domaines prioritaires de développement sont identifiés et connus de tous il s’agit de l’agriculture et des ses industries de transformation, du tourisme, de la pétrochimie, des nouvelles technologies de l’information et de la communication ainsi que des énergies renouvelables. A chacun d’opter en relation avec les secteurs concernés et en fonction des potentialités de sa wilaya, pour les créneaux qu’il juge créateurs de richesse et de plus-value.
Les élus locaux de tous bords et appartenance doivent être vos partenaires dans cette bataille pour la croissance. Impliquez-les dans vos plans de développement de vos territoirs et dans la communication avec les citoyens pour expliquer les différents choix et options. Mais surtout et avant tout, veillez à ce que les communes et vos administrations donnent l’exemple en matière de rationalisation des dépenses et de lutte conte les gaspillages, la gabegie, la bureaucratie et le laisser aller.
Durant ces dernières années, plusieurs actions ont été menées visant la redynamisation du développement local et l’amélioration du quotidien du citoyen. Concentrons nos ressources sur l’amélioration des services publics et des différentes prestations rendues et sur l’entretien et la maintenance des innombrables infrastructures et équipements réalisés et acquis au prix d’un effort lourd de la collectivité nationale.
« Notre objectif est de faire mieux avec moins de moyens tout en favorisant la production nationale »
Un intérêt particulier doit être accordé à la promotion des régions du sud et des hauts-plateaux pour atténuer les disparités en termes de développement local et entreprendre des actions de mise à niveau au profit des populations de ces wilayas. Messieurs les walis délégués nouvellement nommés dans le sud, sous l’autorité de leurs walis respectifs, auront la responsabilité de l’accomplissement de cette lourde tâche.
Mesdames et messieurs,
La prochaine rentrée sociale et celles des secteurs de formation est un rendez-vous important pour lequel l’ensemble des conditions de réussite devront être réunies. En relation avec les secteurs en charge de services publics, les autorités locales devront s’assurer de la mobilisation des moyens humains et matériels adéquats en matière de continuité des services de l’eau, de l’énergie, des postes, de la santé ainsi que du déroulements des inscription scolaires et universitaires sans oublier l’approvisionnement réguliers du marché national et la réactivité optimale des services de sécurité et de protection civile.
Les walis et les élus locaux doivent s’impliquer pleinement dans les opérations de distribution et de cession des logements sociaux et d’éradication de l’habitat précaire. Il est également important d’instaurer un système de gestion urbaine qui consacre le principe de l’unité de la ville afin de garantir une gestion cohérente et un développement harmonieux, tout en faisant bénéficier les citoyens d’administrations de proximité et des services de bases dont ils ont besoins.
Nous devons débarrasser nos villes et nos localités des fléaux qui les dégradent comme l’insécurité, l’insalubrité et l’occupation anarchique des espaces.
Toutes ces décisions pour relancer notre économie et absorber le choc pétrolier toucheront des habitudes, des vieux réflexes et des intérêts. Elles recevront donc, des résistances plus au moins fortes. Mais notre principal allié dans ce combat futur sera la population si nous lui disons la vérité, lui expliquons notre démarche et si nous arrivons à gagner sa confiance.
Les Algériens doivent savoir par exemple que se sont les mêmes personnes qui dix ans auparavant hurlaient qu’il ne fallait pas rembourser la dette par anticipation, qui crient aujourd’hui à la catastrophe et sèment un discours de défaite et de capitulation.
Je suis de ceux qui croient en leur pays, en ces capacités énormes et en le génie de ses enfants. Malgré le contexte économique défavorable, nous pouvons bâtir une économie émergente et diversifiée.
« Le scepticisme est le mal incurable des nations dont nous devons impérativement prémunir l’Algérie »
Je vous remercie.
Source: Rencontre Gouvernement-Walis: Allocution du Premier ministre M. Abdelmalek Sellal